Pollutions de Perenco : La société civile dénonce la mise en place d’un comité conjoint Gouvernement-pollueur
Le communiqué du gouvernement relatif aux pollutions imputables à la compagnie pétrolière franco-britannique Perenco n’a pas laissé la société civile indifférente. Elle a dénoncé le 21 janvier la mise en place d’un comité conjoint entre le Gouvernement et le pollueur. Elle exige la plus grande fermeté pour la défense des intérêts du Gabon et des communautés riveraines gravement impactées par ces pollutions.
Engagé aux côtés des populations impactées par les activités de la compagnie pétrolière franco-britannique Perenco à Etimboué, le Réseau des organisations libres de la société civile pour la bonne gouvernance au Gabon (ROLBG) a estimé, après le communiqué du gouvernement sur les pollutions de Perenco, que «la réaction du gouvernement est une fuite en avant qui confirme son inaction, son manque d’autorité et de pouvoir régalien en dépit des constats désastreux résultant des atteintes généralisées à l’environnement occasionnées par Perenco».
Réagissant le 21 janvier à cette posture du gouvernement, le ROLBG considère que ce dernier a maladroitement ignoré de mentionner l’ensemble des pollutions attestées par de nombreux rapports provenant de la société civile et des communautés riveraines. «Une attitude aux antipodes du rôle de régulateur du gouvernement et de sa responsabilité en matière de suivi des obligations contractuelles des entreprises du secteur extractif», a-t-il dénoncé.
Les foyers de pollutions de Perenco
Rappelant que les pollutions de Perenco ont commencé depuis 2012 avec à la clé, une pollution à grande échelle constatée dans la lagune Nkomi, le président exécutif national du ROLBG indique qu’elles se sont accrues au fil du temps. Selon Georges Mpaga, de nombreux foyers de pollution ont été découverts à BP, rivière Ompolounè, à l’entrée du Fernand-Vaz avec en prime, des effets dévastateurs sur la mangrove et sur tous les écosystèmes marins de la zone. «Pour y faire face, Perenco a utilisé un personnel local non formé, sans équipements appropriés et exposé aux effets de la pollution» fait-il savoir, craignant qu’avec la montée des eaux, les fuites d’hydrocarbures polluent davantage la lagune Nkomi.
Le président du ROLBG évoque également des désastres à Batanga, à 150 mètres de la base de l’opérateur, où des couches importantes d’hydrocarbures ont été déversées sur une surface de près d’un hectare. Il en est de même à Oba, la grande plateforme pétrolière et gazière, à 40 km d’Omboué et à 17 km de Ntchongorove dans le parc national de Loango, où la pollution s’étend sur près de 3 hectares, à 150 mètres de l’océan et dans les différents cours d’eau.
«L’impact sur la végétation est considérable», note Georges Mpaga qui révèle l’existence d’une pollution d’ampleur constatée dans la zone de Ntchonga, avant de signaler que la dernière pollution à grande échelle causée par Perenco dans le département d’Etimboue s’est produite dans la nuit du 18 au 19 janvier 2021 à Dome, précisément à la sortie de la lagune Nkomi et de l’embouchure d’Olende. «Devant ce nouveau désastre écologique, comme à son habitude, Perenco a utilisé des solutions douteuses, aléatoires et artisanales pour lutter contre la marée noire, en faisant appel à une équipe de 28 personnes engagées localement».
L’Etat complice ?
Taxant de criminel le caractère des agissements de Perenco au Gabon, la société civile exige du gouvernement dans le cadre de la résolution de cette affaire, «la plus grande fermeté pour la défense des intérêts du pays et des communautés gravement impactées par les activités nuisibles de Perenco à Etimboué».
Dénonçant la mise en place d’un comité conjoint entre le gouvernement et le pollueur, elle y voit «la preuve irréfutable de collusion et de conflit d’intérêt aboutissant à un affaiblissement du rôle régalien de l’Etat». Le ROLGB s’offusque de ce que le comité écarte les principales parties prenantes que sont la société civile et les communautés locales. Une situation, semble-t-il, en opposition aux principes qui régissent le secteur extractif, pendant que le Gabon aspire à un retour à l’ITIE.
«L’opacité dans la gestion de ce dossier par le gouvernement gabonais et son soutien à peine voilé à un opérateur extractif hors-la-loi, risqueraient de compromettre les chances du pays à intégrer de nouveau cette norme essentielle pour une gestion saine et partagée des ressources extractives», a prévenu Georges Mpaga. Au-delà des deux plaintes déposées devant les juridictions nationales, la Société civile et les communautés riveraines comptent attaquer Perenco à l’international, notamment en France, en Grande Bretagne et devant la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples basée à Arusha, en Tanzanie.